"Il faut avoir du chaos en soi pour enfanter une étoile qui danse." (Nietzsche)

Dans le cadre de ma formation, un stage professionnel de 500h est requis.
Ce stage, j'ai eu la plus grande des difficultés à le trouver mais j'ai tout de même eu la chance de le faire dans le type de structure que je souhaitais : une structure spécialisée dans l'insertion socioprofessionnelle des jeunes.

500 heures, soit presque 4 mois...
....qui se sont achevées hier.

La fin du lever obligé à 6h, ça aurait dû me soulager...au contraire, ça m'a déprimée.
C'est que ce fut une expérience fortement enrichissante! J'ai appris tellement sur la structure, sur le travail en équipe et sur moi!

C'est bizarre, le sentiment qui s'est emparé de moi en abordant cette dernière journée : encore du travail à faire mais pas de pression, presque déjà du détachement. La conscience qu'on fait tout pour la dernière fois, et qu'il va falloir dire au-revoir.

Journée émotions....la première lorsqu'un conseiller a débarqué dans le bureau que j'occupais pour m'offrir un DVD de Genesis.  J'ai déjà été très touchée par cette initiative.
Je voulais préparer un peu mes au-revoir....il y avait des choses que je voulais témoigner mais dont je savais que je ne pourrai pas les prononcer sans m'effondrer. Alors j'ai préparé deux mots de remerciements, l'un à destination de l'équipe que j'ai accroché en cuisine. L'autre adressée à ma tutrice que j'ai déposé, accompagné d'un morceau de nougat, sur le bureau de ma tutrice lorsque je l'ai vue partir assurer le standard (l'agent d'accueil étant en congés).  Il était important pour moi de leur dire le plaisir que j'avais eu à travailler avec eux. Et de dire à ma tutrice à quel point j'étais heureuse d'avoir été encadrée par elle, dans une attitude toujours emprunte de respect, de confiance, de considération....une incarnation de la hiérarchie idéale!

Après avoir vaqué à diverses occupations, je suis allée au standard pour proposer à ma tutrice de la relayer. Bref, elle s'éclipse, avant même que j'aie pu formaliser ma proposition, sans que ça n'attire mon attention puisque dernièrement j'avais coutume de prendre le standard le vendredi, à cette heure-là.  Le standard est calme, je me connecte à FB et y écrit un statut attestant de mon cafard en ce dernier jour. A peine déconnectée, une conseillère prend le standard (ce qui ne m'étonne pas non plus, elle le prend le vendredi après-midi), elle répond au téléphone et se tourne vers moi "Il faut que t"ailles en cuisine. Mathilde [ma tutrice]  veut te voir, elle a l'air en pétard".

Je m'étonne, elle confirme. Et je flippe. Parce que ça ne ressemble pas à Mathilde, que je n'ai jamais vue s'emporter en 4 mois de temps. Parce qu'elle m'a écrit une évaluation élogieuse la veille. Parce qu'on n'a jamais eu de conflits. Mais j'ai peur. Parce que je l'estime beaucoup et que son avis est important. Que je ne veux surtout pas partir en laissant un mauvais souvenir.
Je vais quand même en cuisine et suis un peu rassurée en l'entendant, l'air guillerette :"mais qu'est-ce qu'elle fait, Marie-Odile?"

J'entre....et découvre l'équipe. Je les dévisage, interdite, le coeur battant la chamade.
Mathilde prend la parole, et me dit que l'équipe voulait me remercier pour le travail accompli tout au long de mon stage. Ils m'offrent un très beau cadeau : de quoi faire moi-même les salades que j'affectionne en été et que j'ai toujours emmenée toute faite pour déjeuner en stage. Un très bel ensemble composé d'un grand plat, de petits ramequins, de récipients pour l'huile et le vinaigre, poivrière, salière.

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Impossible de décrire mon émotion. Je pensais partir dans une relative indifférence....mais non! J'ai été visiblement beaucoup plus appréciée que je ne l'ai cru. Et mon travail a été reconnu. Chacun y va de son petit mot, pendant que je les remercie un à un. Quel moment!

Mathilde propose un thé, que j'accepte, consciente qu'il s'agit du dernier. On le partage avec la psychologue. Chacun retourne à son poste. Mathilde retourne au standard, je lui dis qu'à la base j'y étais allée pour lui proposer de la relayer. Elle accepte ma proposition mais me dit de finir mon thé. Pendant ce temps, je discute avec la psychologue. Une belle conversation, presque comme si on était collègues.

Je rejoins Mathilde une dizaine de minutes plus tard, m'excuse pour le délai en lui en expliquant la raison : "mais c'est normal, attend! Et puis c'est ton dernier jour!"

Et puis l'après-midi passe très vite, entre une mission confiée par Mathilde et la préparation de ce dont j'ai besoin pour finaliser mon rapport de stage. En toute fin d'après-midi, elle descend alors que je commençais à trier et préparer mes affaires. Elle me demande alors de passer la voir avant de partir : "Mais Mathilde, j'aurais jamais pu partir sans te dire au-revoir". Chemin faisant, je croise Nicole, absente le matin, qui m'abreuve de mots gentils. L'émotion est palpable, je sais qu'il est temps de dire au-revoir à ces gens qui auront tellement compté pour moi. Et je prends la mesure de la difficulté de la tâche.

Je monte prendre congé de Mathilde. Je lui remets un CV utilisé pour mener à bien le travail confié, ainsi que le support à mes premiers travaux. Les larmes n'étaient pas loin en montant, elles coulent franchement en posant mon dernier acte de stagiaire.  Je m'excuse, me trouvant stupide. Mathilde me reconnaît le droit d'être humaine. Elle décrit ces émotion comme positives, en tant qu'elles sont le signe que j'ai bien vécu mon stage. Elle a raison, même si c'est difficile. Elle et Nicole ont, encore et toujours, des mots très doux. Elles me redisent de ne pas hésiter à les solliciter en cas de besoin. Mathilde me redit de ne pas hésiter à donner son nom si j'ai besoin de références pour un employeur. Elles me redisent toutes les deux le plaisir qu'elles ont eu à m'avoir dans la structure, elles louent mon implication et mon sérieux....c'est un moment fort, très fort! On se dit qu'on se donnera des nouvelles, les adresses mail sont échangées et je décide alors que je leur remettrai en mains propres mon rapport sur ma mission de stage.

Mais il est temps de partir, mon train m'attend. Nicole me dépose à la gare, en renouvelant ses douces paroles.

Et voilà, c'est fini. C'était bon mais c'est fini...

Publié le Samedi 27 août 2011 à 20:45 par m4rie-odile

La confiance? C'est l'attente que notre désir de collaborer ne sera pas déçu, et que nos vulnérabilités ne seront pas exploitées par autrui. La confiance est une intuition, parfois une décision (plus ou moins argumentée) et une espérance, bien plus qu'une certitude. Elle est une forme d'optimisme, centré sur les relations sociales : comme l'optimisme, elle n'est pas un aveuglement face aux difficultés (en cas de vrais problèmes, optimistes et pessimistes réagissent de la même manière) mais une tranquillité face à l'absence de problèmes manifeste. Alors que l'optimisme ne modifie pas forcément les situations matérielles, la confiance peut le faire : accorder sa confiance à quelqu'un peut l'inciter à évoluer favorablement, et contribue aussi à rendre la société plus humaine.
 
[...]

Ne pas faire confiance, c'est consacrer beaucoup d'énergie à se méfier, observer, surveiller, vérifier, temporiser. C'est vivre dans une tension physique et une vision du monde négative qui vont s'avérer épuisantes et toxiques. C'est avoir du mal à baisser la garde alors que nous pourrions le faire. Cela permet certes d'éviter certaines duperies ou certaines déceptions. Mais à quel prix?
 
[...]

La confiance suppose évidemment  d'accepter un risque social relatif, celui de la tromperie ou de la duplicité de nos interlocuteurs, pour un bénéfice palpable, qui est celui de la qualité de vie.
Les bénéfices émotionnels de la confiance sont constants, par rapport aux avantages matériels ponctuels de la méfiance. "Trop bon, trop con?". Et si les "bons cons" avaient une vie plus heureuse que les "toujours méfiants"? Et si nous étions condamnés à nous faire avoir de toute façon dans notre vie? Et si cela ne devait rien - ou beaucoup moins que ce que nous pensons- à la méfiance ou à la confiance?
 
Christophe André,
In Imparfaits, libres et heureux - Pratiques de l'estime de soi

Publié le Lundi 22 août 2011 à 21:03 par m4rie-odile

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